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 Au théâtre 140 - Les "Soft Machine" - Le Soir (Bruxelles) - 29 novembre 1969


LES " SOFT MACHINE "



Les « Soft Machine »

Après Amougies, après le festival underground de Bruxelles, il nous prit, avouons-le, une sérieuse indigestion de musique « pop ». Une certaine envie d'être méchant aussi, accompagnée d'un furieux besoin de dételer du « hippisme », ce cheval de bataille des publicistes, pour retourner chez Brassens, Nougaro ou autres Hélène Martin.

Et puis, au théâtre 140, ce jeudi, un choc, une révélation, une antigrogne : les « Soft Machine ». Leur musique débute sur un thème concret, joué à l'orgue, se poursuit sur des variations des cuivres, laisse pointer un zeste de Bach, se ponctue dans les rythmes de la batterie, s'assouplit en dialoguant avec la voix du chanteur. Rien de neuf? Peut-être. Mais tout est dans la manière. Ces six musiciens anglais ont tout entendu, tout écouté, c'est une sorte de résumé « pop » dans ce qu'il a de meilleur qu'ils nous offrent.

Bien plus, ils ont le culot — c'est presque un crime lèse-pop — d'introduire dans leurs interprétations des « mélodies », des « thèmes », auxquels le profane peut se raccrocher. Commercialisation du genre? On peut le penser. Nous y avons plutôt retrouvé une émotion, un sens du phrasé, alors que d'autres groupes ne créent qu'une ambiance ou une sensation uniquement physique.

Ils sont bruyants. Mais avec des nuances, et leur musique est faite pour tous, même si elle n'est pas au goût de tout le monde. Qu'on le veuille ou non, ils sont un peu le reflet de notre époque. Un monde angoissant, asphyxiant, où les arbres se droguent au béton et où romantisme rime avec automobilisme. Ce souffle-là, ils le traduisent parfaitement.

Tous les spectateurs les ont-ils acceptés? Non. Certains, qui s'attendaient à une explosion anarchique, sont sortis de la salle bien déçus, désappointés par la maigreur de la moisson des decibels.

Avec leurs qualités et leurs défauts (ils ne dédaignent pas un certain « cinéma » comme de jouer torse nu ou de s'amener en scène en enlevant la veste; ils ont une certaine sagesse dans l'improvisation qui pourrait un jour se révéler être une impasse), les « Soft Machine » valent le déplacement.


L. H.



       
     
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